ALAIN BASHUNG
Alain Bashung – Immortels

L’homme à la guitare blanche n’a cessé de proclamer : « J’ai dû rêver trop fort ! ». Entre un Johnny Hallyday et un Jacques Brel, Alain Bashung n’était pas seulement l’un des seigneurs de la chanson française, il était aussi un show-man étincelant souvent ignoré (cf. Live Tour 85).

Alain Bashung est né à Paris le 1 décembre 1947. Il commence à jouer en 1966/1967 dans des bases militaires américaines. S’en suivra dix années de galères. Le Jean-Luc Godard du rock se cherche. Ses premiers 45 tours de variétés ne laisseront aucune trace dans la mémoire collective, comme ce T’es vieux, t’es moche enregistré en 1966. Par la suite, Bashung se produira avec les Dunces, un groupe « skiffle » qui met à leur programme des reprises éclectiques, de Bob Dylan à Cat Stevens en passant par Mouloudji.
En 1972, le voici en Robespierre, dans l’opéra rock La Révolution française, sur une musique de Claude-Michel Schönberg. 1977 est l‘année de son premier album sous son nom. Baptisé Romans-Photos, le disque marque le début d’une collaboration avec Andy Scott (au son) et le parolier Boris Bergman, véritable roi du jeu de mots avec lequel il va former un duo assassin.  alain bashung

Il faut attendre 1979 pour le voir révélé dans les médias. La chanson Gaby résonne sur les ondes et anime les bals de village. Le titre est le sommet de sa première période blues-rock (Roulette Russe, Pizza). Bashung est entouré de musiciens créatifs, le fidèle guitariste Olivier Guindon et Manfred Kovacic (claviers), François Delage (basse) et Philippe Drai (batterie).
Son virage new wave serré, acide, débute en 1982 avec Play Blessure, l’un des plus beaux albums de rock sombre des années 80 en collaboration avec l’incontournable Serge Gainsbourg (Lavabo, Scènes de manager, Martine boude…). « Faire un disque avec lui était un vieux rêve. J’étais fan depuis longtemps. », dira Bashung.
Après les singles SOS Amor et Touche pas à mon pote, le chanteur rebelle publie en 1986 Passé le Rio Grande qui renoue avec le succès commercial. Une première Victoire de la musique méritée témoignera de cet élan salvateur en tant que meilleur album de l’année 1987. Deux ans plus tard, entouré de musiciens anglais et allemands (Phil Manzanera, Blixa Bargeld, Colin Newman), l’album Novice le replonge dans la new wave anglaise. Le parolier Jean Fauque devient son compère attitré, même si Boris Bergman n’est jamais loin.
Dès lors, comme pour les Rita Mitsouko, Alain Bashung va conduire sa carrière d’une façon respectable. Il portera le rock français à bout de bras à travers le désert des années 80. Tantôt proche du public (Vertige de l’amour, Rebel, Osez Joséphine), tantôt retranché dans son univers country-new wave, le personnage alimentera une gravité cynique doublée d’un humour sauvage.
Le phénoménal album Osez Joséphine enregistré à Memphis avec Sonny Landreth et Bernie Leadon (The Eagles) se vendra à plus de 3500 000 exemplaires. L’album contient essentiellement des reprises de Bob Dylan, Buddy Holly, Gene Vincent et un incontournable Nights in white satin des Moody Blues avec ses sonorités de guitares acoustiques et steel. Toutefois, Bashung se rattrape avec l’ascétique Chatterton en étant épaulé par une pléiade de guitaristes mythiques du rock : Link Wray, Marc Ribot, Sonny Landreth). C’est sa période « américaine ».
Pour Bashung, sa longue expérience fait bon ménage avec sa créativité, comme l’illustre sa manière de recourir au folk, rock, drum’n’bass, blues, cool wave et moyen-oriental. Après une reprise époustouflante et décomposée de la chanson de Christophe, Les mots bleus, sur la compil Urgence (contre le sida), sa Fantaisie militaire (1998) marque son retour en France, avec les collaborations des Valentins, Rodolphe Burger (Kat Onoma), Joseph Racaille, et l’Anglais Ian Capie (Tricky, Desu) en charge du son de l’album.
C’est encore un sommet, qui lui vaut trois Victoires de la musique en 1999 : artiste de l’année, album de variété-pop-rock et vidéo-clip pour La nuit je mens, réalisé par Jacques Audiard. Par la suite, Bashung déclarera : « Avec ce disque, j’ai tout fait pour ne pas faire de l’académique. J’ai l’impression de courir mais que régulièrement on me rattrape. Finalement, ce n’est pas désagréable. » Ce récidiviste avait déjà récolté trois récompenses, celle du meilleur album en 1987 (Passé le Rio Grande), et deux pour Osez Joséphine en 1993, dont cinq nominations (interprète et clip de la chanson-titre par Mondino).
Parallèlement à sa carrière de chanteur, le compositeur de Ma petite entreprise, toujours vaillant, entamera une carrière d’acteur en jouant à la télé et dans le film trash d’Arrabal, Le cimetière des voitures (1982), mais aussi dans Rien que des mensonges, Secret de famille, L’ombre du doute, Mon père, ma mère, mes frères et mes sœurs (1999), et Ma sœur chinoise.
De cette carrière riche en rebondissement, le Prévert pervers reprendra de Jacques Brel Le tango funèbre et Hey Joe d’Hendrix. À l’occasion, le compositeur Bashung s’adonnera à quelques musiques pour l’image : Nestor Burma, Le cinquième pouvoir, Le beauf et La peur des mots. Alain Bashung a aussi dit les poèmes de L’Anthologie de la poésie française (tome1, De la Chanson de Roland à Ronsard) en 1999 (Editions de Thélème).
Depuis sa disparition en 2009, les premiers hommages ne se sont pas fait attendre. Outre une ‘Victoire de la musique’ à titre posthume (2010) et la parution de l’intégrale de ses œuvres composées de 12 albums studio, cinq en live et quelques enregistrements en duo, Bashung aura droit à un vibrant hommage avec Tels Alain Bashung, un disque constitué de 12 reprises interprétées par différents acteurs de la chanson française : Noir Désir, Vanessa Paradis, Miossec, Dionysos, Christophe, Benjamin Bioley, etc. En 2011, sortie des tiroirs, paraîtra en intégralité une étonnante reprise de l’album de Serge Gainsbourg, L’homme à tête de chou.

© Source ‘Le rock de A à Z’

Alain Bashung – Gaby oh Gaby (Live officiel Confessions Publiques 1995)